Des outils pour apprendre par la réciprocité

 

Ce recueil de fiches concerne la mise en pratique de la réciprocité, véritable force pour apprendre et enseigner, pour former et se former, pour accompagner des formations, pour développer, revisiter et continuer à inventer l’Éducation populaire…

Cet ouvrage comprend quatre parties :
1. Pour comprendre la force de la réciprocité pour apprendre : des expériences, des témoignages de pratiques dans des champs divers.
2. Pour animer, de la création à l’évaluation…
Comment faire, depuis la création d’un Réseau, en passant par une demande d’apprentissage par la réciprocité, jusqu’à l’organisation des temps de réflexion sur les démarches ?
3. Pour essaimer : de l’école à la cité…
Des récits d’expériences, des descriptions de pratiques et d’outils pour mettre en oeuvre la réciprocité.
4. Pour se donner un avenir…
En construisant ensemble un mouvement social et culturel et en oeuvrant ainsi pour le Bien commun.
 

 

Claire Héber-Suffrin, enseignante et formatrice, docteure en sciences de l’éducation, est cofondatrice des Réseaux d’échanges réciproques de savoirs^®.

Le domino
À l’instar de la part « domino » de cet objet insolite, les outils sont des objets importants, on ne peut faire sans eux, et accessoires, ils doivent être au service des humains qui entreprennent un projet, y compris celui d’apprendre.
Le domino est un accessoire de connexion, il sert donc à connecter, à raccorder, à brancher, à dériver.‭ ‬Le savoir est un outil, il sert à se relier, à soi et aux autres, à raccorder le passé, le présent et l’avenir, à connecter et brancher des points de vue, des projets, des relations. Il invite à dériver vers l’inconnu à explorer. Les outils de cet ouvrage aussi ne sont qu’au service de projets humains et humanisants qui leur donneront du sens.
Le domino, c’est également un accessoire de l’électricité. Le monde de l’énergie qui éclaire, qui réchauffe, qui met en mouvement. Comme le savoir : il éclaire, il réchauffe, il met en mouvement. Comme Apprendre ! Comme transmettre. En ce temps où, hélas à si juste titre, nous remettons en question certaines sources d’énergie, il est intéressant de toujours se rappeler que les outils doivent être cohérents avec les valeurs, les choix de société, l’avenir pour tous. Les outils que sont les savoirs : « Cher professeur, Je suis un survivant de camp de concentration. Mes yeux ont vu ce qu’aucun homme ne devrait voir : des chambres à gaz construites par des ingénieurs instruits. […] Des femmes et des bébés exécutés et brûlés par des diplômés de collèges et d’universités. […] Aidez vos élèves à devenir des êtres humains. […] La lecture, l’écriture, l’arithmétique ne sont importantes que si elles servent à rendre nos enfants plus humains »1.
Comme ces outils d’animation, d’accompagnement, de transmission : ils sont partagés ici pour être, non pas plaqués (et rejetés si, après une utilisation incohérente ils n’ont pas eu les effets espérés) mais réinventés par leurs utilisateurs, améliorés, croisés, partagés..

L’harmonica
C’est aussi un instrument. Pas tout à fait dans le même sens que le domino : celui-ci est plutôt un outil !
L’harmonica est un instrument de musique, à vent, des lamelles « métalliques de longueurs différentes produisent les notes en vibrant au passage de l’air, aspiré ou soufflé […] par la bouche, cette conjonction étant peu fréquente pour un instrument à vent »2.
Il produit de la beauté, il transmet des complaintes et des berceuses anciennes de nos campagnes, il raconte la vie des humains (le blues), il exprime des sentiments (tristesse, joie…), il est un objet de culture (il y a au Japon, des orchestres d’harmonicas qui interprètent les œuvres du répertoire classique). Il est aussi un instrument de musique « accessible » ! C’est l’instrument le plus vendu au monde ! C’était celui du monde paysan, avec l’accordéon, et du monde ouvrier.
Cette boîte à outils se veut un instrument au service de la culture et de son partage, au service de projets coopératifs, au service des savoirs s’ils permettent de vivre, de raconter la vie, de créer de la beauté.
Et cet objet étrange issu d’un jeu de croisement entre le domino comme outil et l’harmonica comme instrument, que nous dit-il ?
Il est une création, il parle de création, il invite à la création. Comme nous aimerions que ses utilisateurs utilisent cet ouvrage. Ce recueil d’outils, d’expériences, de témoignages, de réflexions, invite à mettre en musique tout ce que nous avons appris, ce que nous voulons apprendre, pour aller vers soi, comme un être forcément inattendu, y compris pour soi-même, vers les autres, définitivement imprévisibles et inattendus, vers le monde à transformer par nos outils, nos savoirs, nos arts et nos relations.

1. Jean-Daniel Rohart, L’élève au centre des apprentissages, Voies livres, 1995.